Mieux que quiconque, Trust a su donner ses lettres de noblesse au hard-rock français. Dans un domaine musical qui fait la part belle aux groupes anglophones (Kiss, AC/DC, Scorpions, ...), Bernie Bonvoisin et ses comparses ont prouvé que la langue de Voltaire pouvait se marier parfaitement avec la révolte et les guitares électriques. Alors que Téléphone rassemble la jeunesse autour de lui, Trust passe à la vitesse musicale supérieure.
Un groupe ordinaire
L'histoire de Trust commence pourtant comme celle de nombreux groupes. Trois amis, Bernard Bonvoisin (dit Bernie), Raymond Manna (dit Ray) et Norbert Krief (dit Nono) forment le groupe Trust et écument les boîtes parisiennes en compagnie de deux guitaristes.
Leur premier concert a lieu en septembre 1977 au célèbre Golf Drouot, concert pendant lequel ils expriment leur amour du "rock métal" en reprenant AC/DC ou Sex Pistols.
Remarqué pour leur fougue et leur énergie, ils enchaînent par l'Olympia, en première partie du groupe néo-punk Bijou. Dès l'année 1978, une de leurs premières compositions sort en 45 tours sous le titre Prends pas ton flingue (Paris by night en face B).
Si ce disque n'a pas de succès, il permet cependant au groupe de rencontrer, durant l'enregistrement aux Studios Pathé, Bon Scott, chanteur et leader du groupe AC/DC, qui deviendra un ami, un protecteur et un mentor. Ainsi invite-t-il Trust à se produire en première partie d'AC/DC en octobre 78. Les rockeurs français ne perdent pas l'occasion de se faire connaître, et signent dans la foulée chez CBS, maison de disques avec laquelle ils enregistrent en 1979 et en Angleterre leur premier album éponyme.
Premier album
L'album Trust sort donc au printemps 79. La tournée qui suit permet l'envol du groupe. Ray quitte la scène pour prendre les commandes commerciales de Trust et se fait remplacer par Yves Brusco, alias Vivi.
Dès lors, le groupe ne cache pas ses ambitions musicales et ses convictions politiques. Résolument "antisocial" voire anarchiste, Trust se produit partout où la révolte gronde, n'hésitant pas à jouer dans l'enceinte même de la célèbre prison française de Fleury Merogis !
Pour de nombreux fans, Trust ose dire tout haut ce que Téléphone, trop tendre et commercial, chante tout bas. Ainsi leur premier album se démarque du rock ambiant, avec des titres tels que Bosser huit heures, Prends pas ton flingue ou encore Police-Milice.
Encouragés par leur ami anglais Bon Scott, Bernie et ses amis rejoignent Londres pour l'enregistrement de leur deuxième album, Répression, qui sort en mai 1980. Porté par le tube Antisocial, cet opus reste l'ouvrage le plus abouti du groupe. Malheureusement, Bon Scott ne connaîtra pas le succès de cet album: dans la nuit du 19 février 1980, il décède dans des circonstances dramatiques.
Hommage à Bon Scott
Les concerts de la tournée Répression réunissent des milliers de fans dans toute la France et jusqu'en Angleterre qui reconnaît en Trust le pendant francophone des plus grands groupes de Hard anglo-saxon.
L'album Marche ou crève (octobre 1981) confirme le ton: La junte, Ton dernier acte (chanson hommage à Bon Scott) et Les Templiers restent dans la lignée de Répression et confirment le talent de parolier et de chanteur du leader Bernie. Des textes solides et révoltés, des guitares énervées et mélodieuses à la fois, un rythme à toute épreuve. La recette est recherchée et efficace.
Malheureusement, dès l'année 1983, Trust doit subir un premier revers: leur tournée est un gouffre financier dont ils ne peuvent sortir. Le quatrième album finira d'engloutir les dernières économies du groupe et le plonge alors dans un marasme dangereux. Rien ne pourra sauver Trust, ni le cinquième album rock'n roll en 1984, ni l'amour de leurs innombrables fans: Bernie annonce le 31 juillet 1985 la séparation du groupe.
Espoirs déçus
Durant les années qui suivent, le public espère sans cesse les retrouvailles de Trust. Celles-ci viendront à plusieurs reprises, malgré une carrière solo de Bernie (tant dans le cinéma que dans la chanson) et les chemins séparés qu'empruntent chacun des membres (Nono joue pour Johnny Hallyday).
Ainsi Trust se retrouve sur la scène du Zénith de Paris pour deux soirs de concerts en première partie d'Iron Maiden en septembre 1988. A défaut d'enregistrer de nouveaux albums studio, les rockeurs exploitent intelligemment le filon "live": Paris by night, En attendant, puis Live, deux albums en concert et un mini-album, rencontrent un vif succès.
Il faut attendre 1996 pour que la formation entre à nouveau en studio. Le résultat: Europe et Haines, un album de grande qualité, qui surprend le public et les détracteurs du groupe. Les différentes préoccupations de chacun ralentissent le travail en commun, et laisse entendre que jamais Trust ne sera définitivement réuni. Dernier cadeau: Ni Dieu ni Maître, un album testament au titre évocateur, sorti en 2000.
Après un quart de siècle de rock rageur et électrique, la bande de Bernie Bonvoisin survit dans le coeur des fans et continue de marquer l'histoire du rock de son empreinte inimitable.